dimanche 15 avril 2012

En politique, mieux vaut "savoir hurler contre la réalité" que de toujours baisser les bras


Le mensuel du Golfe a interrogé François Goulard sur le risque d’annulation de la procédure contre Total après le naufrage de l'Erika.
Partagez-vous les inquiétudes de nombreuses parties civiles et notamment le point de vue de Corinne Lepage, avocate de certaines de ces dernières, quand elle estime que cette décision constitue « une régression considérable, à la fois sur la question du préjudice écologique et de la responsabilité pénale » ?
François Goulard, député UMP du Morbihan, président du conseil général du Morbihan a répondu :
Lorsque  Corinne Lepage dit cela, elle fait de la politique, pas du droit. En droit, le juge ne peut faire autrement que de reconnaître que la prédominance d’une convention internationale sur les conventions nationales. Il ne sert à rien de hurler contre la réalité. La réalité, c’est l’existence de cette disposition internationale, que nous devons faire évoluer au bon échelon.

Photo Le Mensuel du Golfe.

On ne peut que s'étonner des propos de François Goulard quand on sait qu'il a été secrétaire d'Etat à la mer et qu'il préside aujourd'hui un des départements maritimes qui a été touché par la catastrophe de l'Erika en 1999.
Dans ses réponses, il s'en prend à Corinne Lepage, considérant qu' "elle fait de la politique, pas du droit" et qu'il "ne sert à rien de hurler contre la réalité".
Effectivement, dans cette affaire, Corinne Lepage et François Goulard ne mènent pas le même combat.
Corinne Lepage a défendu depuis 1999 les collectivités territoriales. Elle a peut-être  "hurlé contre la réalité", elle a surtout proclamé le principe pollueur-payeur et au final obtenu des indemnités pour nombre de collectivités territoriales touchées par cette catastrophe.
Pour sa part, le Morbihan a perçu 2 millions d'euros de dédommagement.
Qu'a fait François Goulard pendant toutes ces années. L'a-t-on entendu dénoncer Total ou faire évoluer le droit maritime national ou européen ? Chacun pourra juger.
Si les collectivités ont été indemnisées, c'est parce qu'il y a eu plusieurs procès. Si Total a dédommagé les parties civiles, c'est en bonne partie grâce à Corinne Lepage et certainement pas à François Goulard qui se montre dans ses déclarations un piètre représentant de la collectivité qu'il représente.
Michel Grall, autre député UMP du Morbihan, fait preuve de plus de discernement en déclarant: "Si la cour de cassation annule toute la procédure de l'Erika, il s'agirait là d'un véritable retour en arrière, peu compréhensible et injuste pour les Bretons et pour tous ceux qui ont été frappés par la marée noire. La notion de préjudice écologique serait mise à mal. C'est inacceptable pour nos habitants et nos territoires".
Corinne Lepage considère que les propos de François Goulard sont irresponsables de la part d'un ancien secrétaire d'Etat à la mer et actuel président d'un département maritime. Ses déclarations ne font preuve que de résignation et de conservatisme. Les Morbihannais pourront se souvenir aux prochaines élections qu'il se montre plus soucieux des intérêts de Total que de la défense de l'environnement.
Franck Poirier
Délégué régional Bretagne de CAP21